Time to Gray.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
L’événement de la semaine, c’est la sortie d’Armageddon Time, le dernier film de James Gray, l’un des plus passionnants cinéastes de sa génération, qui réalise là une œuvre très personnelle. Personnels aussi, bien que très nettement contraints, les courts-métrages du Festival Faire un film en 48h, dont nous verrons le millésime 2022. Et puis cette semaine, il y aura aussi un GrecDoc, et l’Avant-première de Saint-Omer, la très attendue et oscarisable première fiction d’Alice Diop, en sa présence, et aussi un Ciné-club Louis Lumière où Alan Guichaoua nous parlera de À l’Abordage. Bien sûr, Le Serment de Pamfir, de Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk, et Bowling Saturne, de Patricia Mazuy, poursuivent leur carrière sur nos écrans, qu’ils partagent avec d’autres de nos plus anciens succès.
Chaque année, de jeunes équipes répondent, souvent avec talent et toujours énergie, au défi de Festival Faire un film en 48h. Vendredi et samedi, lors de 10 séances, elles viendront montrer ce qu’on peut faire avec des potes, de l’envie, des idées et une caméra en deux jours chrono. Rafraichissant.
Lors du GrecDoc de dimanche à 11h30, nous verrons comment Yannis Karpouzis agence de précieuses archives pour évoquer un grand poète moderniste. Nikos Karouzos – en route vers le printemps décortique le travail de recherche de ce grand monsieur de la littérature grecque contemporaine.
Dimanche toujours, mais à 16h, Alice Diop est invitée par la 7e Journée Art et Essai du cinéma européen à nous montrer en avant-première Saint-Omer, puis à en débattre. Cette reconstitution d’un terrible fait divers représentera la France lors de la prochaine remise des Oscar hollywoodiens.
La semaine des événements sera bouclée mardi à 19h30 avec le Ciné-club Louis Lumière du mois. Alan Guichaoua, qui a assuré la lumière de À l’Abordage, lumineuse comédie de Guillaume Brac, racontera son expérience de chef-opérateur après la projection.
Le Queens, quartier populaire de New York, dans les années 80, où grandit l’enfant James Gray. Son grand-père, Juif d’Ukraine y est arrivé en 1920 pour fuir les pogroms russes lors desquels il fut témoin de l’assassinat de ses parents. Déjà… Le vieux monsieur, incarné par un formidable Antony Hopkins, va transmettre des bases morales à son petit-fils car, comme dans la chanson Armageddon Time qui donne son titre au film, « a lot of people won’t get no justice tonight ». Le pote Afro-Américain du jeune double de James Gray éprouvera cruellement ces paroles. Armageddon Time évoque une histoire vraie qui a marqué le réalisateur. Par ce film, auquel le chef-opérateur Darius Khondji a redonné les couleurs des eighties, James Gray exorcise un souvenir traumatique, partage son attachement à la transmission des valeurs, livre son film le plus personnel, et réalise une œuvre juste qui touche au cœur. Présenté à Cannes, Armageddon Time était notre Palme d’Or. Le Jury en a décidé autrement. Tout le monde peut se tromper.
Le Serment de Pamfir a, de son côté, fasciné la Quinzaine des Réalisateurs et illumine nos écrans depuis mercredi dernier. La caméra fluide de Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk suit donc Pamfir, bête humaine qui, par amour de sa famille, renoue avec ses vieux démons. Une plongée dans la dureté de la campagne ukrainienne où règne un ubuesque tyran. Patricia Mazuy, elle, nous immerge dans la psyché meurtrière d’une masculinité toxique. Précis, glaçant, oppressant, Bowling Saturne, parle de féminicide, un mot malheureusement trop présent dans l’actualité.
D’autres films moins noirs, mais non moins intéressants, conservent l’affiche (voyez-les en fin de lettre), et permettez-nous de conclure avec l’Enfance de l’Art. Mercredi à 14h30, ce sera pour les petits Maison sucrée, Jardin Salé, et dimanche à 14h, on suivra Charlot sur la Route, de l’immortel Chaplin.
Belle semaine.