Rendez-vous avec et sans Garrel.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Alors que, la semaine prochaine, sortira sur nos écrans son dernier film (Un Eté Brûlant), nous consacrons une large part de notre programme à une rétrospective du cinéma de Philippe Garrel. Mais ce cher Philippe laisse un peu de place aux Contes de la Nuit, délicieuse digression poétique en 3D de Michel Ocelot, à Deep End, tragédie de l’adolescence dans le Londres des 70’s signée Skolimowski, et aux Noirs dans le Cinéma Américain, cycle qui montre tout ce que les Afro-Américains ont apporté au cinéma US. Et ajoutons à cet alléchant programme deux évènements, dont nous allons parler tout de suite.
Jeudi à 20h, le Cinéma-Club a convié Michel Ciment pour débattre d’un film méconnu d’un grand cinéaste : Les Visiteurs d’Elia Kazan. Grec né en Turquie est arrivé très jeune aux USA (c’est le sujet de America, America), Kazan s’intéresse d’abord au théâtre, au point de cofonder ce qui deviendra la référence de la formation du comédien de l’après-guerre : l’Actors Studio. Le naturalisme du jeu que prône son école le conduit au cinéma. Il met notamment en scène ses élèves, comme Brando dans Un Tramway Nommé Désir et Sur les Quais, ou James Dean dans A l’Est d’Eden. Au fait de sa gloire, Kazan connaît pourtant la honte de « trahir » ses idéaux et certains de ses amis en les dénonçant devant la tristement célèbre Commissions des Activités Anti-Américaines. Il poursuit toutefois sa carrière, dans un esprit de recherche formelle qui, parfois, lui sera reproché. Au tournant des années 70, entre l’Arrangement et Le Dernier Nabab, deux films au casting et au budget prestigieux, il tourne Les Visiteurs. C’est ce « petit » film, tourné sans star, sans million de dollars, en 16mm et sur un scénario de son fils, que nous vous proposons jeudi. Cette histoire tragique et sobre d’une vengeance entre vétérans du Viet Nam montre la compréhension que Kazan a des rapports humains. A l’issue de la projection, Michel Ciment, biographe et ami du réalisateur, nous éclairera sur la carrière de ce grand monsieur, mort en 2003.
Autre évènement de la semaine, la présence, mardi 27 à 22h, de la comédienne Leigh Taylor-Young. Révélée par la célèbre série des années 60 Peyton Place, Leigh n’a jamais arrêté de tourner pour le cinéma et la télévision. Elle fut, aux côtés de Charlton Heston et Edward G. Robinson, à l’affiche de Soleil Vert, cauchemardesque film d’anticipation du génial touche-à-tout Richard Fleischer. Dans un futur totalitaire, caniculaire, désertique et surpeuplé, les plaisirs de la vie ont disparu et l’on ne se nourrit plus que d’une pâte verte synthétique et sans saveur, dont la fabrication même est une abjection. Leight viendra nous raconter le tournage de Soleil Vert, l’une des premières évocations des terreurs environnementales au cinéma.
Philippe Garrel, lui, filme l’intime et la désillusion. Depuis plus de 40 ans, Garrel a imposé son style, trouvé sa façon à lui de fabriquer du cinéma, et parvient toujours à surprendre ses spectateurs. Avant la sortie de son dernier film, Un Eté Brûlant, le Grand Action vous convie à une petite révision de votre Garrel en 14 films. Car d’autres œuvres de ce réalisateur exigeant, intransigeant parfois, viennent rejoindre celles qui étaient déjà à l’affiche la semaine dernière. Ainsi, en plus de son premier long métrage, Marie Pour Mémoire, complété par un court (Les Enfants Désaccordés), du Lit de la Vierge, étrange film religieux et politique, de La Cicatrice Intérieure, errance a-narrative avec Nico, de L’Enfant Secret, son premier vrai succès, de Sauvage Innocence, sur les difficultés d’un réalisateur en deuil, ainsi que les Amants réguliers et La Frontière de l’Aube, deux films récents avec son fils Louis, vous pourrez aussi voir son père, le regretté Maurice, dans Liberté la Nuit, où il interprète un marionnettiste prit dans la tourmente de la Guerre d’Algérie. Egalement au programme La Naissance de l’Amour, avec Jean-Pierre Léaud, héritier, comme Garrel, de la Nouvelle Vague, ainsi que Elle a Passé tant d’Heures sous les Sunlights, la mise en abîme d’une mise en scène, et J’entends Plus la Guitare, une variation sur l’amour d’esprit rohmerien, tous deux avec la formidable Mireille Perrier. Dans un genre plus expérimental, ne manquez pas Les Hautes Solitudes, portrait intime et muet de Jean Seberg et, parce chacune de ses prestations est incroyable, Catherine Deneuve face à Xavier Beauvois dans Le Vent de la Nuit.
Semaine décidément chargée puisque se poursuit notre cycle sur les Noirs dans le Cinéma Américain, avec les films de la semaine dernière. à savoir : Morgan Freeman dans Miss Daisy et son Chauffeur, Sydney Poitier dans Devine qui Vient Diner, Duane Jones dans La Nuit des Morts Vivants, Denzel Washington dans Le Diable en Robe Bleue, ainsi que Loin du Paradis, de Todd Haynes, Du Silence et des Ombres, de Mulligan et Boulevard de la Mort, de Tarantino. La semaine prochaine, d’autres films viendront compléter ce cycle.
Vite-vite pour conclure cette longue lettre, la dernière séance de Il Etait une Fois en Amérique, et Chantons sous la Pluie proposé par l’Enfance de l’Art. Bonne semaine.