Promesse de cinéma
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Lorsque l’on a fait la queue, acquis son billet, que l’on s’installe et que le noir se fait, la promesse du cinéma souffle à nos oreilles. Et c’est le bonheur. La promesse à laquelle nous nous engageons, semaine après semaine, c’est de vous montrer de bons films, de beaux films, des films que nous aimons. Là, ce sera un cycle Marco Bellocchio, grand du cinéma italien contemporain, un autre consacré à Harmony Korine, pour mieux comprendre le parcours de ce trublion américain qui bouleverse les codes avec son récent Spring Breakers, et un dernier qui célèbre Shakespeare à l’écran. Nos deux stars des précédents semaines, Passion, de De Palma, et Django Unchained, de Tarantino, restent à l’affiche, mais la grande promesse de la semaine, c’est l’événement autour de l’avant-première de Promised Land, le prochain Gus Van Sant. Très logiquement, nous débuterons cette lettre par Gus.
Vendredi soir à 20h, nous vous proposons de découvrir son prochain film en avant-première, lors d’une soirée militante proposée par l’Association La Ruche (qui consacre son énergie aux alternatives écologiques), en présence de Marc Lipinski, Directeur de Recherches au CNRS et Président de l’ARENE (Agence Régionale de l’Environnement et des Nouvelles Energies). Le débat qui suivra le film sera animé par Jean-Michel Couzon et se prolongera autour d’un verre au Grand Bar. Pour lancer la soirée, Promised Land, que nous projetterons en salle dès sa sortie le 17 avril, s’imposait. Gus Van Sant y retrouve Matt Damon dans le rôle d’un cadre d’une grande société énergétique. Lorsqu’il débarque dans une vallée ravagée par la crise, Matt ne doute pas que sa proposition de forage de gaz de schiste va faire un tabac. Las. Les réticences des villageois vont bouleverser ses certitudes. Au delà de l’intrigue, Gus Van Sant s’attaque à un gros sujet de société qui divise les partisans du court-termiste énergétique et les défenseurs de la planète.
Très politique également, le cinéma de Marco Bellocchio. Le cycle que nous lui consacrons permet de revenir sur la carrière d’un cinéaste qui ausculte la société italienne. Ses premiers longs métrages, Les Poings dans les Poches et La Chine est Proche, réalisés en 1965 et 1968, entraient en résonance avec les mouvements sociaux et révolutionnaires de la fin de la décennie. En 1980, il met en scène Michel Piccoli et Anouk Aimée, frère et sœur qui se complètent, se détestent et s’apprêtent à faire Le Saut dans le Vide. Entre interrogations anticléricales dans le Sourire de ma Mère, conjugales dans Le Metteur en scène de Mariages, observations de la dérive terroriste dans Buongiorno Notte, et questionnements sur le fascisme dans Vincere, Bellocchio construit une œuvre singulière et engagée qui mérite d’être redécouverte.
Il est des rencontres qui changent la vie. Lorsque le jeune Harmony Korine rencontre Larry Clark, maître de la photographie, la vie des deux hommes, que 30 ans séparent, en est bouleversée. Korine va écrire le scénario de Kids, premier film de Clark. Ils récidiveront quelques années plus tard, sur le même thème de l’adolescence, avec Ken Park. Mais le scénariste ne se contente pas d’écrire sur la jeunesse américaine déboussolée. Korine passe aussi à la réalisation, d’abord avec Gummo, puis Julien Donkey Boy, gamin à problèmes d’une famille à problèmes, et Mister Lonely, l’histoire d’un sosie de Michael Jackson qui rencontre le clône de Marilyn Monroe. Son récent Spring Breakers ratisse toujours le même sillon. Dans ce film trash et lyrique, déroutant et stylisé, pop et effrayant, quatre jeunes filles franchissent la ligne rouge pour organiser leur spring break, évasion de printemps et rite de passage pour les étudiants américains. Korine y confirme sa patte, et son sens assez incroyable de la mise en scène.
Rappelons rapidement que Passion et Django Unchained, derniers films respectivement de Brian De Palma et Quentin Tarantino, sont toujours à l’écran, et que le cycle Shakespeare à l’écran se poursuit. L’occasion de voir ou revoir le carcéral César doit Mourir, des Frères Taviani, le classique Henry V, de Laurence Olivier, et la quête de Paccino dans Looking for Richard. Parmi les personnages emblématiques, Hamlet, en version Kurosawa (Les Salauds dorment en Paix) ou – lointainement – Lubitsch (To Be or Not Be), Macbeth, vu encore par Kurosawa (Le Château de l’Araignée), ou le Prospero de la Tempête, vu par Greenaway (Prospero’s Book) ou Mazursky (Tempête).
Et concluons avec l’Enfance de l’Art : le délicieux et noir Frankenweenie de Tim Burton (version 2012) sera projeté dimanche à 14h.
Excellente semaine.