Paper Moon.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Si nos transfuges restent à l’écran via le cycle d’Est en Ouest mené par le train d’enfer du Runaway Train d’Andrei Konchalovsky, nous vous proposons de (re)découvrir Paper Moon, formidable road-movie de Peter Bogdanovich. La semaine sera aussi marquée par la rentrée du Cinéma Club avec Les Ensorcelés, de Vincente Minnelli.
Jeudi à 20h, les anciens élèves des grandes écoles reprennent leur rendez-vous cinématographique avec du pur, du vrai, du grand, du classique. Réalisé en 1953 par Vincente Minnelli, Les Ensorcelés est le portrait au vitriol d’un producteur (le carnassier Kirk Douglas), selon différents points de vue de celles et ceux qui l’ont côtoyé. C’est redoutable, et mené avec la virtuosité habituelle du réalisateur. Mais soyons sûrs que Patrick Brion, aussi brillant à la critique qu’à l’écriture, vous en parlera mieux que nous. Il présentera la séance et animera le débat à suivre, prolongeant le plaisir jusqu’à rester en notre compagnie pour le cocktail au Grand Bar.
Peter Bogdanovich fut aussi critique de cinéma avant de passer de l’autre côté du miroir. D’abord acteur, il mène une carrière un peu rare mais qu’il poursuit toutefois à l’occasion. Puis vite, lui vint l’envie de tenir la caméra. Le succès fut presque immédiat avec La Dernière Séance, puis surtout What’up, Doc ? une « screwball comedy » avec un couple détonnant – Barbara Streisand et Ryan O’Neal – qui transforme le réalisateur en héritier des grands du burlesque. Devenu son propre producteur, il a les mains assez libres pour adapter un roman à succès de Joe David Brown, Addie Pray, titre un temps envisagé puis abandonné pour Paper Moon (en Français et dans une traduction non littérale, La Barbe à Papa). Bogdanovich reconvoque Ryan O’Neal pour le rôle de Moses, et engage sa fille, Tatum, pour lui tenir compagnie et porter le film en interprétant la jeune Addie. Dans un Kansas en pleine dépression, Moses Pray, escroc à la petite semaine, assiste à l’enterrement d’une ex-maîtresse et accepte d’emmener sa prétendue fille de 9 ans, Addie, chez une tante. Le chemin va être semé d’embûches, de rencontres, de disputes et d’embrouilles, qui permettront à la gosse et à son éventuel père de dépasser les tensions initiales et, au final, de se trouver. Au delà du sujet touchant traité par de petites touches délicates, le duo O’Neal fonctionne à merveille. Et vaudra à Tatum un Oscar pour sa prestation du meilleur second rôle. Elle le recevra pour son dixième anniversaire, et demeure à ce jour la plus jeune lauréate de la prestigieuse liste des oscarisés.
Si le Runaway Train de Konchalovsky embarque à son bord deux furieux évadés qui foncent à l’aveugle vers leur terrible destin, il traîne derrière lui tout un tas de wagons de films : ceux de notre cycle d’Est en Ouest, tous réalisés par des cinéastes ayant fuit la censure crypto-communiste. Ainsi l’on pourra voir Le Sacrifice, dernier film de l’immense Andreï Tarkovski, qui fut l’un des maîtres de Konchalovsky, Taking Off, les débuts américains de Milos Forman qui avait déjà brillé dans sa Tchécoslovaquie natale avant le Printemps de Prague, et Arizona Dream, où Emir Kusturica prouvait qu’il pouvait aussi travailler avec le système hollywoodien. La Pologne communiste, période Gierek ou Jaruzelski, fournit aux cinémas occidentaux nombre de grands réalisateurs. A commencer par Roman Polanski qui avait profité d’un premier succès local pour prendre la poudre d’escampette. En Angleterre, il tourna le Bal des Vampires, puis chercha un pays d’accueil avant de s’installer durablement en France. Notons que son dernier film, La Vénus à la Fourrure, sortira le 13 novembre dans nos salles. Si Jerzy Skolomowski opta pour nos voisins britanniques, qui lui permirent de tourner Deep End, Andrzej Zulawski préféra notre beau pays, où il trouva l’amour (avec Sophie Marceau, même s’il sont aujourd’hui séparés) et les moyens de réaliser L’Important c’est d’Aimer, un extraterrestre filmique qu’il faut avoir vu. Krzysztof Kieslowski fut aussi de ceux qui prirent un aller simple Pologne-France, et débuta avec la très belle et Double Vie de Véronique.
Django ayant déserté, terminons avec nos trois rescapés des précédentes semaines. Restent donc à l’affiche L’Homme qui en savait Trop, inévitable Hitchcock, Enquête sur une Passion, de Nicolas Roeg, et The Great Gatsby, de Jack Clayton.
Quant à l’Enfance de l’Art, elle nous plonge dans le Londres de Dickens, avec Oliver Twist, adapté par David Lean, avec Sir Alec Guinness en Fagin.
Bonne semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.