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L'Édito

Palindromes

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Palindromes

Chères spectatrices, chers spectateurs, A l’instar de kayak, radar, été, ici ou « rions noir », Tenet est un palindrome. Tout comme le nom de son réalisateur – Nolan, à une lettre près – ce mot peut se lire dans les deux sens. Un titre particulièrement bien choisi, puisque le très attendu dernier film du grand Christopher traite de remonter le temps, comme si on le lisait de droite à gauche. Autre inversion des temporalités, Tenet sort en France avant d’avoir été projeté aux USA. La faute à la Covid – puisque le virus est désormais féminin – qui, comme le film de « Nalon » retourne la marche du monde pour en éviter la destruction. D’autres futurs sont à voir au Grand Action cette semaine, à commencer par Light of my Life, second film post-apocalyptique et néanmoins intimiste, où Casey Affleck explore les rapports père-fille. Scanners, cauchemar où Cronenberg fait exploser les cerveaux, poursuit aussi sa seconde carrière sur copie restaurée. Voyons ça dans l’ordre

 Et, à tout seigneur tout honneur, commençons par Tenet. Auteur, réalisateur et producteur, Christopher Nolan réalise là son film le plus coûteux, et ça se voit. Comme on vous rappelle qu’avant il a dirigé Interstellar, Inception, Dunkerque et la trilogie des Batman – qui ne sont pas vraiment de « petites productions » – vous devinerez que Tenet est hautement spectaculaire. Mais c’est surtout un film diablement intelligent et tordu (ici, dans le bon sens du terme) où Nolan prouve, une fois de plus, qu’on peut fabriquer des gros blockbusters sans prendre le public pour un idiot, et même le faire réfléchir. John David Washington (fils de Denzel et révélé par BlacKkKlansman) et Robert Pattinson interprètent des agents secrets chargés d’éviter la troisième Guerre Mondiale, qu’une mystérieuse arme temporelle rendrait fatale. Même si le grand méchant (épatant Kenneth Branagh), les voyages luxueux et les somptueuses scènes d’action, évoquent James Bond, les sauts et les inversions du temps complexifient l’histoire, au point que le spectateur est tenté d’écouter le conseil de l’experte (Clémence Poésy, Cocorico !) : « Ne tentez pas de comprendre, ressentez ». Et l’on ressent fort cette explosion de sons et d’images, magnifiquement orchestrée par la virtuosité du réalisateur, qui nous gratifie de quelques séquences d’anthologie. On ressort de Tenet, certes un peu sonné, mais avec une seule envie : reprendre l’hélicoptère… surtout si l’on a du mal avec la non-linéarité du temps. Pause d’élégance britannique dans ce tonitruant film quantique et palindromique, l’apparition de Sir Michael Caine, régulier complice de Nolan et mythique majordome Alfred de Batman, est un régal. Bref, foncez voir Tenet et ne vous sentez surtout pas bête si vous ne saisissez pas tout du premier coup. Il suffit juste de remonter le temps.

 Si l’on tente d’éviter l’apocalypse dans Tenet, elle a bien eu lieu dans Light of my Life. Dans son second film, Casey Affleck interprète également le rôle principal, celui d’un père qui doit protéger sa jeune fille, alors que les femmes, victimes d’une mystérieuse épidémie, ont quasiment disparu de la surface du globe. Si le futur que dépeint le réalisateur est plutôt anxiogène, son film est illuminé par l’amour entre un père et sa fille, la très convaincante Anna Pniowsky

 Celles et ceux qui ont vu Scanners à sa sortie en 1981 n’ont sans doute pas oublié ce film horrifique, où David Cronenberg déclinait ses obsessions (le corps, ses transformations, ses pouvoirs et ceux de la science) avec un sens aigu du spectaculaire. Les autres seront ravis de découvrir cette curieuse histoire de médiums, qu’une entreprise veut enrôler pour régenter le monde. Surtout que la copie neuve redonne éclat – si l’on peut dire – à la scène culte du film. 

Pour ne pas bouleverser l’ordinaire ordonnance de nos courriels hebdomadaires, nous conclurons avec l’Enfance de l’Art. Mercredi à 10h30, La Petit taupe aime la Nature, classique de l’animation tchèque, ravira les petits, tandis que La Croisière du Navigator, menée par Captain Keaton, embarquera tout le monde dimanche à 14h15. Belle semaine, quel qu’en soit le sens.

Belle semaine.

Isabelle Gibbal Hardy et l’équipe du Grand Action.