Noble entreprise
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Raconter une histoire en images, évoquer l’intime et l’universel, défendre un propos, imposer des personnages, mobiliser des énergies ; il faut tout cela pour faire exister un film, et c’est une noble entreprise. On peut s’y risquer avec délicatesse comme Kelly Reichardt dans Showing Up, ou de façon plus baroque, brutale, déconstruite, comme Saul Williams et Anisia Uzeyman pour Neptune Frost. Le duo sera dans la salle mercredi à 20h pour présenter ce film musical hypnotique et déroutant d’une Afrique futuriste. Mais l’entreprise peut aussi être sujet de cinéma. C’est le projet de EN(tre)PRISE DIRECTE, un nouveau rendez-vous dont la première aura lieu mardi soir. Avant cette date qui clôturera la semaine et outre les films affichés en bas de lettre, nous aurons suivi trois autres événements qui nous sont plus familiers. Une séance CJC (jeudi 20h), un Rendez-vous du cinéma Grec (vendredi 20h) et un dominical Du Décor à l’Ecran devant Thérèse, du génial Alain Cavalier, à 18h.
Commençons donc par le programme sensoriel, flottant et envoûtant des Intimes Territoires, proposé par le Collectif jeune Cinéma (CJC). Jeudi soir, Ignorant ta chute, film numérique de Mario Fanfani et Emmanuel Vigier, entrera en résonnance avec Agua de vinagre, projeté lui en 35mm, et réalisé dans le même format par Frédérique Menant. Débat à suivre. Le lendemain à 20h, Yorgos Goussis sera l’invité des Rendez-vous du cinéma Grec pour présenter et nous faire découvrir Magnetic fields, un drame inattendu…
Alain Cavalier est un drôle de réalisateur, par ses sujets, par son ton, par son économie, et surtout par sa façon de travailler. Dimanche à 18h, Jean-Pierre Berthomé, historien du décor de cinéma, qui dédicacera de son nouveau livre, LE DÉCOR DE FILM de D. W. Griffith à Bong Joon-Ho et présentera Thérèse, la sainte de Lisieux.
L’entreprise et le cinéma ? Quelle drôle de rencontre ! Pourtant, faire du cinéma en est une, et suivre la vie de celles et ceux qui font société peut en faire naître. EN(tre)PRISE DIRECTE, nouveau festival documentaire, s’intéresse à la vie de l’entreprise au moment où sa place, sa morale et sa responsabilité sociale et environnementale font l’objet de vives discussions. Mardi soir, après la projection de La Voix de son maître, Gérard Mordillat, co-réalisateur du film (avec Nicolas Philibert), débattra avec Anne Pruvot, dirigeante de SNCF Connect and Tech, et Ollivier Pourriol, philosophe.
Sur les hauts-plateaux du Burundi, un mineur meurt sous les coups de ses gardiens, mais son frère se rebelle. Avec un.e hackeur.se intersexe, il va faire émerger une insurrection, aussi virtuelle qu’implacable. Drôle d’objet que ce Neptune Frost, drame social, vision futuriste, comédie musicale, qui puise sa source dans l’imaginaire de l’Ouest africain, bâtit son tronc sur l’anticolonialisme, monte ses branches vers la techno, et se nourrit de la déconstruction sociale et personnelle. Mercredi à 20h, Saul Williams et Anisia Uzeyman présenteront leur film, qui sort dans nos salles le jour même. Ne ratez pas ce cinéma-là, aussi narrativement libre que philosophiquement cyberpunk, qui déroute autant qu’il fascine ; vous n’avez jamais vu ça (ou alors pas souvent).
L’autre star de la semaine, c’est notre amie Kelly Reichardt dont le dernier Showing Up entame sa deuxième semaine d’exploitation. Tous les inconditionnels de Kelly retrouvent ici la patte de la cinéaste, sa façon de filmer sans en avoir l’air, toujours à la bonne distance, avec sa capacité à percevoir de minuscules choses et à en tirer une vérité. Ils retrouvent aussi Michelle Williams, fidèle actrice, qui apparaît dans 4 films du cycle que nous consacrons à Kelly. Dans Showing Up, elle est Lizzie, une artiste qui prépare une expo dans le chaos de sa vie. Délicat et savoureux.
Dirty, Difficult, Dangerous, le deuxième long-métrage, attachant et désespéré, de Wissam Charaf garde l’affiche, tout comme les films listés ci-dessous. Derniers mots rituels pour L’Enfance de l’Art et ses deux séances de la semaine. Mercredi 14h30, nous arpenterons Ma Petite planète chérie, de Jacques-Rémy Girerd, et le dimanche sera rusé comme un goupil avec le Fantastic Mister Fox, de Wes Anderson, of course. Le tout bien entendu présenté par Diane, responsable de l’accueil du jeune public.
Belle semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action