L’art et le chaos.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Après sa présentation à Cannes en 2022, son récent vernissage en avant-première au Grand Action, voici donc l’accrochage de Showing Up sur nos écrans. Le nouveau Kelly Reichardt, l’histoire d’une artiste chaotique qui prépare son exposition, est accompagné d’un Cycle consacré à la réalisatrice, figure majeure de l’indé US. Cette semaine sera aussi animée par un GrecDoc sur Les Accords du sud (dimanche 16h) et un Ciné-Club Louis Lumière qui, mardi à 19h30, nous annoncera que, selon Patricia Mazuy et Mathilde Muyard, sa monteuse, Paul Sanchez est revenu ! A Beyrouth, la vie de Mehdia et Ahmed est toujours Dirty, Difficult, Dangerous, mais aussi pleine d’espoir devant la caméra de Wissam Charaf. D’autres bons films, affichés en bas de lettre, sont toujours à voir au Grand Action.
Dimanche à 16h, les amis du GrecDoc en ont choisi un de Nickolas Tsiamantanis, où il suit Les Accords du sud. Pourtant, dans la Grèce frappée par la crise et le chômage, il y aussi beaucoup de désaccords.
Et le second événement de cette semaine aura lieu mardi à 19h30 pour la boucler en beauté avec le Ciné-Club Louis Lumière. Mathilde Muyard, monteuse de Paul Sanchez est revenu !, nous montrera comment ce criminel porté disparu depuis 10 ans, incarné par le toujours convainquant Laurent Lafitte de la Comédie-Française, a réussi son coup.
Kelly Reichardt a parfaitement choisi le titre au participe présent de son dernier film. ToShow Up, c’est apparaître soi-même, faire apparaître quelque chose, et dans les deux cas, l’assumer. Dès lors, Showing Up s’imposait pour raconter la vie de Lizzie, artiste en pleine préparation d’une expo, aux prises avec le chaos du quotidien, de ses amis, de sa famille, de la plomberie et de son chat. Par petites touches quasi-documentaires, franches, sensibles, sans effet ni distorsion, avec le simple regard posé qu’elle travaille film après film, Kelly Reichardt capte ce que produit son monde avec un calme olympien et une justesse sidérante. Dans First Cow, il s’agissait de fabriquer des oily cakes ; dans Showing Up, des sculptures. De la pâte que l’on pétrit et que l’on cuit, avec la même incertitude, la même fragilité, la même application routinière. La réalisatrice retrouve Michelle Williams pour la quatrième fois après Certaines Femmes, La Dernière Piste, et Wendy et Lucy, trois des films de notre Cycle Kelly Reichardt. Filmographie exhaustive de cette farouche indépendante qui prend le cinéma américain à contre-pied.
Ancien reporter de guerre, Wissam Charaf filme l’amour de Mehdia et Ahmed. Même si leurs illusions semblent se fracasser dans un Beyrouth déliquescent, même si leur passé pèse sur leur destinée, même si le métal suinte de la peau d’Ahmed, même si un pale Nosferatu tente d’étrangler Mehdia, même s’ils vivent dans la misère, même s’ils sont des exilés, des traumatisés, des parias, ils s’aiment, et ils y croient. Totalement, inconditionnellement, définitivement. Voici Dirty, Difficult, Dangerous, le deuxième long-métrage d’un réalisateur qui impose un ton, et une étrange douceur à l’adversité. Une jolie fable, servie par une caméra fluide et un couple de comédiens sur-attachants.
Le reste de la programmation comblera vos envies. Une bonne tranche de fantastique ? Rétrospective John Carpenter. Un singulier polar social coréen ? About Kim Sohee. Un huis-clos psychanalytique ? Eternal Daughter. Un documentaire engagé ? Toute la Beauté et le Sang versé. Un drame nostalgique ? Aftersun. Un mélodrame baroque ? Tár. Un Spielberg ? (oui, c’est presque un genre) : The Fabelmans.
Et si vous êtes parents et qu’il est temps que votre progéniture découvre le cinéma, il y a les trois séances de L’Enfance de l’Art. Mercredi 10h30, Les Mal-aimés, pour les bien-aimés dès 3 ans ; il faut le double pour apprécier pleinement Jacob et les chiens qui parlent (jeudi 10h30). Quant à La Guerre des Boutons, réalisé par Yves Robert en 1962, c’est un incontournable à voir à tout âge, et surtout dimanche à 14h. Les trois séances seront bien entendu présentées par Diane, responsable de l’accueil du jeune public.
Belle semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action