Joyeuses fêtes.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Si vous lisez cette lettre, c’est que les Mayas s’étaient donc bien trompés, tout comme Nostradamus il y a quelques années. La fin du monde n’est pas pour tout de suite – elle viendra bien assez tôt -, mais elle demeure le sujet d’Abel Ferrara dans 4:44, Dernier Jour sur la Terre. Vous pourrez fêter la fin d’année devant ce film définitif et intimiste, ou vous offrir d’autres sortes de plaisirs. Les plus pointus d’entre vous savent sans doute que Quentin Tarantino nous prépare pour mi-janvier un tonitruant western, Django Unchained. Pour patienter jusqu’à cette sortie, le Grand Action vous invite à revisiter l’œuvre et les influences de ce barjot de Quentin avec notre Vidéo-Club Tarantino.
Nous sommes à quelques heures du big Crunch, moment fatal où notre planète va cesser d’exister, et nous avec. Nous sommes dans un loft new yorkais. L’apocalypse approche, mais nous suivons la vie d’un couple. Ne serait-ce la terrible échéance annoncée et acceptée, nous pourrions croire à une journée ordinaire, avec de l’amour, de la jalousie, des disputes, des obsessions, des coups de fil, des trucs absurdes et des choses graves. Nous sommes dans le quotidien, banal comme tous les jours, sauf que c’est le dernier. Nous sommes dans 4h44, Dernier Jour sur la Terre, le nouveau film d’Abel Ferrara. Skye et Cisco, le couple interprété par Shanyn Leigh et Willem Defoe, vaquent à leurs occupations. Elle peint, il erre, comme d’habitude. La rumeur du monde entre dans leur quotidien par la crépusculaire lueur du dehors et celle, blafarde, des écrans. Une tellement moderne solitude. Il ne se passe pas grand-chose lors de cette attente finale. Mais Ferrara parvient à nous faire ressentir une tension, et l’interrogation de ses personnages : Meurt-on seul ou avec quelqu’un ? Il y a un je-sais-quoi d’universel dans ce film sensible et intime, sans doute l’un des meilleurs du réalisateur. S’il a renoncé à la violence brute du King of New York ou de Bad Lieutenant, Ferrara retrouve une force nouvelle et délicate pour laisser filer les dernières heures du monde. Et attendre, dans le loft de Skye et Cisco, qu’il vire définitivement au blanc.
Il est probable que Quentin Tarantino, grand cinéphile, glisserait dans l’une des innombrable listes de films à voir, celui de Ferrara. Et en tirerait sans doute quelque inspiration. Tarantino est allé chercher ailleurs, dans le western spaghetti, celle de Django Unchained, qui sortira le 16 janvier. En attendant, nous vous proposons un petit voyage dans le cerveau cinéphilique de ce réalisateur baroque qui puise partout son désir de film. Au programme de notre Vidéo-Club Tarantino, du Leone lyrique et libre, bien sûr, avec Le Bon, la Brute et le Truand et du Kubrick, non moins lyrique mais plus visionnaire dans 2001, l’Odyssée de l’Espace. Une dose de Hawks, pour la référence au western (Rio Bravo) et à la comédie barrée (La dame du Vendredi) et une rasade sanglante de De Palma (Carrie). Et comme Tarantino n’hésite pas à se plagier lui-même, revoyons son “grindhouse movie“, Boulevard de la Mort, et sa troupe foutraque et radicalement anti nazi des Inglorious Basterds.
Piazza Fontana, de Marco Tullio Giordana, film enquête intransigeant sur l’attentat milanais de 1969, et Fear and Desire, le tout premier long métrage de Stanley Kubrick sont encore au programme, tout comme Looper, le thriller d’anticipation de Rian Johnson.
Terminons l’année et notre lettre par l’Enfance de l’Art, et les Cinq Burlesques de Chaplin, Keaton et Bowers, qu’elle nous propose dimanche.
De quoi passer de bonnes fêtes, que l’on vous souhaite même excellentes.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.