Indépendant.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Même s’il nous arrive de projeter des gros films, comme Hugo Cabret, le conte de Martin Scorsese en 2D ou 3D, vous savez bien que le Grand Action, salle indépendante, est naturellement attaché au cinéma indépendant. D’autant que, deux ou trois fois pas an, des réalisateurs américains qui travaillent hors des grosses structures nous font parvenir une merveille. Et voilà, c’est arrivé. Ça s’appelle Bellflower et ça sort en exclusivité sur nos écrans. Un premier film au budget dérisoire, mais une bonne histoire, des personnages attachants, des idées saugrenues, une vision déglinguée de l’Amérique contemporaine, une mise en scène plus qu’intéressante, une image travaillée, une musique réussie… Et la promesse qu’un cinéaste est né. Il s’appelle Evan Glodell. A côté de cette petite perle, La Fureur de Vivre du grand Nicholas Ray se poursuit, tout comme la rétrospective que nous consacrons à son œuvre, ainsi que les derniers feux de notre festival Chaud Business dans le sillage de Go Go Tales, le cabaret foutraque d’Abel Ferrara.
C’est pour conjurer un chagrin d’amour qu’Evan Glodell s’est lancé dans l’aventure de son film. Il lui fallu plusieurs années pour aboutir à un scénario, convaincre ses proches d’y participer, réunir les US$17 000 pour le produire, puis tourner et monter son film. Face à tant de détermination, et surtout parce que le jeu en vaut la chandelle, nous sommes très fiers de vous proposer Bellflower. L’histoire de deux potes assez largués, fans de Mad Max et qui, pensant proche la fin du monde, se préparent à l’apocalypse. Cette préparation inclut la fabrication d’un lance flamme et d’une buick gravement tunée, devenue une « muscle car » nommée Medusa. Pas sûr que ça suffise, mais ce n’est pas grave puisqu’une love affair va bouleverser les plans. Et la fin du monde prendra une forme beaucoup plus personnelle. On peut sans doute voir des défauts dans ce film d’errance un peu post-adolescent. Mais l’on est obligé de reconnaître l’incroyable énergie qui le porte, la fraîcheur désespérée qui s’en dégage et tout le talent concentré devant et derrière la caméra. Loin du formatage de la majorité de la production US, Bellflower fait souffler un vent nouveau. Tourné en toute illégalité, il a glané pas mal de récompenses, a emballé la presse et nous avec.
A voir aussi une autre image de la jeunesse, plus ancienne puisqu’il s’agit de celle des années 50. Mais on trouve dans La Fureur de Vivre, le même amour des voitures puissantes et un certain désenchantement. L’Amérique quoi ! Et incarnée par James Dean. Pour fêter la ressortie sur une copie toute neuve de ce chef d’œuvre de Nicholas ray, nous vous proposons de réviser la carrière de ce grand cinéaste. Elle débute avec un film noir de série B, Les Amants de la Nuit, s’enchaîne avec Secret de Femme, un drame avec Maureen O’Hara et un autre polar, La Maison dans l’Ombre. Comme beaucoup de jeunes réalisateurs de l’époque, Ray se confronte à tous les genres, y compris le western, comme dans Les Indomptables, avec Robert Mitchum et surtout Johnny Guitar, où il réinvente les codes du genre, en donnant notamment la part belle aux dames. Après La Fureur de Vivre, il fera un nouveau passage par le western avec le Brigand bien-aimé, puis par le polar avec un Traquenard tendu par les magnifiques jambes de Cyd Charisse. Nick’s Movie, film hommage co-réalisé avec Wim Wenders termine ce programme.
L’Ange Bleu, de Von Sternberg, et French Cancan, de Jean Renoir, sont les deux rescapés de notre festival Chaud Business. Mais la vedette tient toujours le haut de l’affiche : dans Go Go Tales, Abel Ferrara nous fait entrer dans les coulisses d’un cabaret new yorkais. C’est joyeux, bordélique, un peu glauque parfois, mais drôlement attachant.
Terminons en redisant qu’Hugo Cabret est toujours à l’affiche et que l’on pourra voir le chemin parcouru par Martin Scorsese depuis Mean Streets, projeté samedi à 14h. Et n’oublions l’Enfance de l’Art qui nous a concocté une petite Soupe au Canard, où Leo McCarey dirige les Marx Brothers. On ne sait pas si, en l’espèce, « diriger » est le bon mot…
Bonne semaine, en attendant la prochaine dont le clou sera, dimanche 31 à 20h30, un ciné-concert avec So This is Paris, fameux muet de Lubitsch, ambiancé par Yannick Lestra au piano et de Remy Fox au saxophone.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action