Hollywood stories.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Depuis le temps que nous célébrons le cinéma hollywoodien, il était temps de passer de l’autre côté de la caméra pour voir comment les réalisateurs traitent l’envers du décor. C’est d’ailleurs le titre de notre cycle Hollywood et l’Envers du Décor, mené cette semaine par sa vedette : Barton Fink. La ressortie sur copie 35mm (oui, oui, en pellicule) du plus titré des films des Frères Coen est un événement. Un autre aura lieu jeudi 17, à l’instigation du Cinéma-Club qui, en la présence de Yann Tobin, nous propose de revoir Un Cœur en Hiver, avant-dernier film de Claude Sautet. Egalement à l’affiche de cette quinzaine (car, pour cause de vacances il n’y aura pas d’envoi la semaine prochaine), Paper Moon, de Peter Bogdanovich, et Runaway Train de Konchalovsky.
Au soir de sa vie, le délicat Claude Sautet a donné une dimension plus sombre à ses films. Délaissant la comédie sociale, il s’attache à scruter le cœur des hommes dont, parfois, le sang se glace. Le Cœur en Hiver, c’est celui d’un luthier retiré du monde (Daniel Auteuil) que bouleverse l’arrivée d’une jeune violoniste (Emmanuelle Béart) dont son ami marchand (André Dussollier) est amoureux. Le triangle va jouer une étrange partition, car, finalement, aucun d’entre eux ne compose la musique. La projection de ce film touchant qui valut à son auteur le César du meilleur réalisateur en 1993, sera présentée et commentée par Yann Tobin (alias N.T. Binh). Nous poursuivrons l’échange avec ce membre éminent de la rédaction de Positif, qui est également scénariste, réalisateur et producteur, autour d’un verre au Grand Bar.
L’autre temps fort, c’est donc la réédition de Barton Fink, qui est le seul film (à notre connaissance et merci de corriger si on se trompe) à obtenir la Palme d’Or, le Prix du Meilleur Réalisateur et celui du Meilleur Acteur au Festival de Cannes. C’était en 1991 et, pour leur quatrième film, les Frères Coen faisaient fort. Barton Fink, interprété par le lunaire John Turturo, est un timide dramaturge des années 40 qui va se faire aspirer par le système hollywoodien. Devenu scénariste de série B, malmené par un monstrueux Tycoon, logé dans un hôtel minable, harcelé par un voisin improbable (le toujours génial John Goodman), il doit écrire un film sur le catch, une discipline dont il ignore tout, et la page blanche le hante. Tout se dérègle dans sa pauvre vie qui tourne au cauchemar. Comme nous l’écrivions en début de lettre, nous sommes très heureux de projeter ce film en 35 mm. Et oui, ça se fait rare et merci au distributeur Mission de faire encore briller le gélatino-bromure d’argent. Surtout que l’esthétique sophistiquée et l’ambiance surannée de Barton, mix très réussi de film noir, de thriller fantastique et d’humour juif, méritent largement la pellicule.
Pour accompagner la plongée de Barton Fink dans le système des grands studios du prétendu « âge d’or », notre Cycle Hollywood et l’Envers du Décors vous invite à traverser le miroir aux alouettes de cette extraordinaire machine à produire du rêve. Nous retrouverons les films de la semaine dernière : le portrait cruel du producteur Des Ensorcelés de Vincente Minelli, Fedora et son terrible destin, de Billy Wilder, l’émergence de la réalité dans la fiction dans Road to Nowhere, de Monte Hellman, le réalisateur obsédé par le Démon des Femmes, de Robert Aldrich, la folie de Cecil B. Demented, de John Waters, les affres du scénariste dans Adaptation de Spike Jonze, le sabotage de la Party, de Blake Edwards et Inland Empire, une expérience cinématographique de David Lynch. Ces film sont rejoints par un petit nouveau, Ed Wood, où Tim Burton évoque la vie du « plus mauvais réalisateur de tous les temps ». Inénarrable, surtout avec Johnny Depp dans le rôle titre.
Entre évènement, cycle et sortie, deux road-movies des précédentes semaines poursuivent leur route. Le premier est plutôt un railway-movie puisqu’il s’agit du Runaway Train qu’Andrei Konchalovsky fait rouler vers l’enfer. Le second, c’est Paper Moon, où Peter Bogdanovich suit une voiture à travers l’Amérique en pleine dépression, avec à son bord un père et sa fille, interprétés par Rian et Tatum O’Neal.
Le dimanche 20 à 14h, l’Enfance de l’Art, nous sert quelques bons vieux burlesques de Chaplin, Keaton, et Etaix, et le suivant (le 27 donc pour ceux qui ont suivi), ce sera la féérie du Roi et l’Oiseau, de Paul Grimault.
Avant de conclure, signalons que prochainement, vous pourrez voir au Grand Action Scarface, version cocaïnée de Brian De Palma (le 30 octobre), puis, deux semaines plus tard, La Vénus à la Fourrure, magnifique adaptation de Sader-Masoch par Roman Polanski. De la drogue, du sang et du sexe, ça promet !
Bonne quinzaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.