Scroll down
L'Édito

Hitchcock, le retour.

L'Édito

Hitchcock, le retour.

Chères spectatrices, chers spectateurs,
Après une semaine de Mon Premier Festival, avec Jacques Perrin en vedette au grand Action, notre cher vieil Alfred revient à (presque) plein temps sur nos écrans, avec deux films sur copie neuve : Fenêtre sur Cour (Rear Window) et Frenzy.

Seul L’Escalier Interdit (Up The Down Staircase), de Robert Mulligan, proposé jeudi et samedi à 14h, viendra troubler cette belle ordonnance hitchcockienne. Pour mémoire, l’Escalier Interdit, un « Entre les Murs » vintage, raconte la rentrée d’un jeune professeur d’anglais dans un collège difficile de New York en 1967. Salué par la critique – à l’époque comme maintenant et notamment par notre ami Michel Ciment – ce film offre un éclairage sensible sur l’immuable difficulté d’enseigner. Et permet aussi de redécouvrir un excellent porteur de caméra, que les cinéphiles purs n’ont pas oublié.

Heureux et fier d’avoir appris le cinéma au temps du muet, Hitchcock considérait que « le parlant n’a souvent servi qu’à introduire le théâtre dans les studios ». Ce fieffé menteur soulignait ainsi l’importance qu’il accordait aux décors, aux cadres et au montage. Il y a quelque chose de géométrique dans le cinéma d’Hitchcock ; géométrie visible ou/et géométrie dramaturgique. Dans Fenêtre sur Cour, un homme (James Stewart), immobilisé par un accident, regarde par sa fenêtre l’agitation des autres fenêtres de la cour, devenues son seul univers accessible. Comme il rechigne à épouser sa fiancée (pourtant c’est Grace Kelly !), il trouve dans les appartements d’en face, aux prises avec le célibat ou le malheur conjugal, de quoi alimenter son refus du mariage. Ainsi, outre la figure géométrique des fenêtres, se dessine une autre géométrie par bijection : celle des sentiments. Même le crime, chez Hitchcock, émerge par une construction mathématique faussement hasardeuse. Implacable, il arrive sans qu’on n’y pense ni le désire. « Que me voulez-vous ? » demande le tueur à son voyeur. Rien. Il voulait juste voir. Comme nous tous.

Dans Frenzy, film tardif acclamé lors de sa présentation à Cannes en 1972, Hitchcock retrouve son Londres d’origine. Et s’amuse à mélanger deux archétypes qu’il affectionne : l’assassin identifié et l’innocent accusé. « On retrouve dans Frenzy, ce monde hitchcockien clos comme un cauchemar, où les personnages se connaissent entre eux : l’assassin, l’innocent, les victimes, les témoins, ce mode réduit à l’essentiel où chaque conversation de boutique ou de bistrot porte justement sur les meurtres en question, un monde fait de coïncidences si méthodiquement ordonnées qu’elles se recoupent verticalement et horizontalement : Frenzy offre l’image d’une grille de mots croisées sur le thème de l’assassinat. » Merci à François Truffaut (Hitchcock-Truffaut, Editions Gallimard) de nous donner une autre lecture de la géométrie hitchcockienne.

Un mot sur la projection de l’Enfance de l’Art, une sélection de courts métrages d’animation français, regroupée sous le titre de l’un d’eux : On n’est pas des Sauvages ! Ce sera mercredi à 14h.

La semaine prochaine, Frenzy quittera l’affiche pour laisser la place à un festival « Manège à Trois », festival annonciateur du prochain James Gray, Two Lovers, où Joaquim Phoenix hésite entre Vinessa Shaw et Gwyneth Paltrow. Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action