Suède, 1846. La troupe menée par le docteur Vogler, magnétiseur de renom, fait route vers Stockholm. En chemin, ils sont arrêtés par les forces de l’ordre et conduits chez le consul Egerman et sa femme, où les attendent également le préfet de police Starbeck et le Dr Vergerus, conseiller médical de haut rang. Accusé de supercherie, Vogler va devoir affronter son confrère qui refuse de croire en l’irrationnel et à ses soi-disant dons surnaturels…
Dans le bien nommé Le Visage, Ingmar Bergman met en scène toute une galerie de personnages dont il va tenter de percer le mystère en étudiant leur visage, cette zone d’ombre et de lumière à la fois expressive et opaque. Les protagonistes se scrutent les uns les autres pour essayer de décrypter une émotion, une vérité, et voir plus loin que les apparences – aboutissant in fine à une scène d’autopsie. C’est notamment le visage du Dr Vogler – visage artificiel puisque celui-ci porte un masque, comme son acolyte M. Aman – que le très cartésien Vergerus souhaite arracher pour conforter ses croyances. Le personnage de Vogler peut se voir comme un double du cinéaste, un artiste ayant perdu foi en son art et que l’on force à révéler les ficelles de ses spectacles, désormais en proie au doute quant à son pouvoir de création. Parallèlement à ce combat des esprits entre les deux hommes, Bergman fait preuve d’un ton plus léger en filmant les marivaudages entre les domestiques, se rapprochant par là du vaudeville. Empruntant les thèmes chers au cinéaste – la troupe itinérante, un univers entre songe et réalité, le questionnement sur le tangible et l’intangible –, Le Visage est une œuvre brillante à la fois drôle et effrayante, filmée dans un splendide noir et blanc au ton expressionniste.