Des femmes et des hommes.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Connaissez-vous le test de Bechdel ? C’est un test militant qui montre, non sans humour, que beaucoup de films sont machistes. Le test consiste à se poser 3 questions : y a t-il deux personnages féminins nommés ? Si oui, se parlent-elles ? Si oui, parlent-elles d’autres choses que des hommes ? Près de la moitié des films récents n’obtiennent pas les 3 points nécessaires pour réussir le test. Alors respectons la parité, avec un programme qui se partage équitablement entre les deux sexes.
Les femmes d’abord, car c’est la moindre des politesses. Pour accompagner la folie de Queen of Earth, le dernier film d’Alex Ross Perry, et celle de Sweetie, le premier long de Jane Campion, notre nouveau Cycle Femmes sous influence rassemble les destins tourmentés de quelques grands personnages féminins. Quant aux hommes, ils sont surreprésentés dans nos trois événements de la semaine. Jeudi à 20h30, les 12 Hommes en Colère de Sidney Lumet vont s’entredéchirer lors de la séance-débat du Cinéma-Club. Lundi à 20h, le docteur Frankenstein et sa créature, version James Whale, vont nous faire frissonner lors du Ciné-Club Univers Divergent. Mardi, encore une histoire d’hommes avec La Dernière Chasse, classique du western de Richard Brooks, choisi par le Ciné-Club Positif. Quant aux films du Cycle William Friedkin, mené par French Connection, pas sûr qu’ils réussissent tous le test de Bechdel…
12 Hommes en Colère est indubitablement l’un des plus grands films du cinéma. Il lança d’ailleurs la carrière de son réalisateur, Sidney Lumet, qui fit preuve d’une immense maîtrise pour rendre haletant le huis clos d’une délibération. Seul un des jurés, le numéro 8, sublime Henry Fonda, refuse d’envoyer le jeune accusé de parricide sur la chaise électrique et va tenter de convaincre les 11 autres. Excellent choix du Cinéma-Club pour ce jeudi soir, avec un débat et un cocktail à suivre.
Lundi, le Ciné-Club Univers Divergents nous fait changer de genre, mais nous propose un autre grand classique. Le Frankenstein de James Whale, produit par le fameux Carl Laemmle en 1931, est la plus célèbre (et notre préférée) des adaptations du mythe prométhéen inventé par Mary Shelley. Reconnaissons qu’elle doit beaucoup à la prestation de Boris Karloff en créature, devenue une icône du cinéma. Le débat animé par le chercheur François Taddei, le critique Jean-Michel Frodon et la psychanalyste spécialiste des questions d’éthique Monette Vacquin s’annonce passionnant et sera suivi d’un verre au Grand Bar.
Le lendemain, mardi donc, également à 20h, notre chère revue de cinéma nous convie à son Ciné-Club Positif. C’est le grand Yann Tobin qui nous présentera La Dernière Chasse, réalisé par Richard Brooks en 1956. Deux chasseurs de bisons, Robert Taylor et Stewart Granger, s’opposent sur la façon de traiter la vie. Celle des animaux, mais aussi celle des Indiens, considérée par l’un d’eux à peu près au même niveau. ça va barder dans l’ouest, dans ce western de la prise de conscience.
Nous aimons beaucoup les jeunes cinéastes du Mumblecore, une sorte de Nouvelle Vague américaine héritière de Cassavetes ou Allen des débuts. Ils filment plus vite que leur ombre et, certes, parfois de façon un peu brouillonne. Mais lorsque, comme Alex Ross Perry dans son dernier opus, Queen of Earth, ils apportent un soin particulier à l’image (signée Sean Price Williams) sans rien perdre de l’énergie propre à la charte Mumblecore, et donnent l’occasion d’une grande composition à une grande comédienne (Elisabeth Moss), on touche au sublime. Elle est donc Catherine, fille fragile et malmenée par la vie, qui va, lors de vacances dans une belle maison, sombrer dans la folie sous les yeux de sa meilleure amie. Une folie noire et angoissante, loin de la folie radieuse de Sweetie, la boule d’énergie imaginée par Jane Campion pour son premier film en 1989. Ces deux beaux personnages ont inspiré un nouveau cycle Femmes sous influence. On pourra y revoir certaines grandes figures de filles dérangées, de la Carrie de De Palma, à la Elisabeth de Persona de Bergman, en passant par les Trois Femmes d’Altman, les deux belles de Mulholland Drive, la Juliette des Esprits de Fellini, et les perturbées de Polanski et Zulawski, souffrant respectivement de Répulsionet de Possession.
Hormis éventuellement L’Exorciste, le cycle William Friedkin, mené par French Connection, suivi de Sorcerer, Killer Joe, Police Fédérale Los Angeles ou Cruising, est nettement plus testostéroné. Tout comme d’ailleurs À l’Ombre des Potences, western de Nic Ray.
Nous retrouverons un peu de douceur et de poésie dimanche avec l’Enfance de l’Art, Bagheera, Baloo et Mowgli, les héros du Livre de la Jungle.
Joyeuse semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.