Bonne nuit et bonne chance.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
En cette période de folie footballistique, le cinéma demeure un excellent moyen d’échapper à des matchs navrants, rythmés par l’entêtante vuvuzela et les commentaires affligeants des consultants. Pour éviter que le ballon rond ne vous mette la tête au carré, voici donc notre programme de la semaine, avec une avalanche de Palmés cannois (dont trois nouveaux), quelques séances de Shutter Island, une pincée de Mary Poppins, la patte du Fantastic Mister Fox, et surtout un Ciné-Club Positif, rendez-vous mensuel de la célèbre revue.
Ce mois-ci, et comme toujours mardi à 20h, la rédaction de Positif a choisi de s’intéresser à un étrange film historique, diablement d’actualité. Edward R. Murrow, présentateur du journal télévisé de CBS dans les années 50, terminait toutes ses émissions par une phrase devenue fétiche : « Good Night and Good Luck ». A l’époque, l’Amérique, pourtant opulente, vivait dans la peur : peur extérieure, via une possible attaque soviétique, et surtout peur intérieure, manigancée par le Sénateur Joseph McCarthy, qui, sous prétexte de traquer les dangereux communistes infiltrés, menait une chasse aux sorcières digne de l’Inquisition. Acteurs, réalisateurs, journalistes, intellectuels de tout poil, quiconque se préoccupait un tant soit peu de justice sociale, était mis au ban de la société par le maccarthisme. Georges Clooney qui, depuis Urgences et what else, a prouvé qu’il était bien plus qu’un bel acteur, s’est, pour son deuxième film en tant que réalisateur, inspiré de l’histoire vraie de Murrow (interprété par David Strathairn), qui osa se rebeller et dénoncer l’iniquité des loi du Sénateur McCarthy. Egalement devant la caméra (il joue l’un des producteurs de l’émission de CBS), Clooney signe là un film sombre et engagé, dans un noir et blanc vintage et classieux. Au delà de l’éclairage historique sur cette époque où le rêve américain ressemblait à un cauchemar, Good Night and Good Luck est aussi une réflexion sur le rôle des média face au pouvoir. Amis auditeurs de France Inter, ça peut vous évoquer quelque chose de plus contemporain. Pour aller plus loin, un rédacteur de Positif viendra présenter la séance et poursuivre le débat après la projection.
Autre bonne surprise de la semaine, les deux séances de Mary Poppins, féérique comédie musicale de la grande époque Disney, avec la succulente Julie Andrew dans le rôle titre. 45 ans après sa sortie, ce film merveilleux qui mélangeait avec virtuosité l’image et l’animation, n’a rien perdu de son charme. Pour le rendre accessible aux plus jeunes, nous le proposons en version française ; version qui – ce n’est pas si courant – est remarquable. Pour enchaîner sur le jeune public, n’oublions pas les séances de l’Enfance de l’Art et le Fantastic Mister Fox, malicieux renard animé par Wes Anderson et auquel Georges Clooney prête sa voix charmeuse.
Le reste de la programmation rend hommage aux lauréats de la prestigieuse Palme cannoise. Cette semaine, 3 nouveaux films viennent rejoindre ceux du Cycle d’Or de la précédente. D’abord Elephant, où Gus Van Sant, revient avec sa poésie trash-adolescente, sur la tuerie du lycée de Columbine vue par les yeux d’un lutin blond. Arrivée aussi de l’Éternité et Un Jour, Palme d’Or en 1998, dans lequel Théo Angelopoulos raconte, via un road movie onirique, la rencontre d’un écrivain malade et d’un jeune Albanais. Troisième nouveau de la semaine, L’Enfant, où dans leur inimitable style à la frontière du documentaire (leur origine cinématographique), les Frères Dardenne suivent la métamorphose d’un jeune paumé (formidable Jérémie Renier) qui devient père. Pour le reste, nous retrouvons les films de la semaine dernière, à savoir : le mythologique musical moderne Orfeu Negro, de Marcel Camus, la tempête loachienne du Vent se Lève, les illuminations scénaristiques de Barton Fink, des Coen, le cigare de Burt Lancaster dans le Guépard de Visconti, la tendre et âpre Leçon de Piano de Jane Campion, la guerre Underground délirante de Kusturica, la montée du nazisme suivant le Ruban Blanc, de Michael Haneke, et les Secrets et Mensonges de Mike Leigh. Dans l’autre salle, Andrzej Wajda bâtira la révolution polonaise avec l’Homme de Fer, Cristian Mungiu nous plongera dans la Roumanie d’avant, pendant 4 Mois, 3 Semaines et 2 jours. Nous suivrons aussi les péripéties d’un hôpital militaire en folie dans M.A.S.H, de Robert Altman, et les amours chantés et désenchantés des Parapluies de Cherbourg, de Jacques Demy. Avec Rome, ville Ouverte, nous serons dans l’Italie des années 50, avec Blow Up d’Antonioni, dans le Londres des sixties, avec Scorsese dans le New York des seventies piloté par son Taxi Driver et Kiarostami nous donnera Le Goût de la Cerise iranienne.
Bonne semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action