Bilan cannois.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Le jury présidé par Tim Burton a donc rendu son verdict. Un verdict très cannois, avec son lot de films exigeants : le difficile Oncle Boonmee qui se souvient de ses vies antérieures du thaïlandais Apichatpong Weerasethakul décroche la Palme d’Or, Lee Chang-dong le prix du scénario pour Poetry, et le tchadien Mahamat-Saleh Haroun, premier représentant de l’Afrique à Cannes depuis 13 ans, reçoit celui du Jury pour Un Homme qui Crie. Nous nous réjouirons de la récompense obtenue par Javier Bardem pour sa prestation d’une incroyable densité dans Biutiful d’Alejandro González Iñárritu.
Après quelques années de disette, notons le retour en force de la France depuis la Palme de Entre les Murs : Juliette Binoche meilleure actrice, Mathieu Amalric, prix de la Mise en Scène pour Tournée, Palme du Court Métrage pour Chienne d’Histoire, signé Serge Avédikian, et le Grand Prix du Jury, sorte de Palme d’Argent, au très attendu Des Dieux et des Hommes de Xavier Beauvois.
Les observateurs remarqueront l’absence notable du cinéma américain, qui domine pourtant largement la production internationale. La compétition cannoise n’a pas pour réputation d’adorer le cinéma US (très présent en revanche au marché du film) et il n’y avait d’ailleurs qu’un de ses représentants en sélection officielle.
Un film américain (réalisé par un anglais, sur une histoire franco-britannique, avec deux vedettes australiennes : c’est beau la mondialisation !) faisait toutefois l’ouverture du festival. C’était Robin Hood, où Ridley Scott raconte la genèse du héros de Sherwood, interprété par Russel Crowe, aux côtés de Cate Blanchett en lady Marianne. Depuis sa projection sur la Croisette, ce Robin est aussi visible dans nos salles. Dans les précédentes adaptations de la légende de Robin des Bois – elles furent nombreuses depuis la toute première en 1908 – on a l’image d’un archer en collant, bondissant pour prendre aux riches et donner aux pauvres. Le film de Scott se termine là où les autres commencent. Dans un scénario riche en rebondissements, on voit un banal archer de Richard Cœur de Lion devenir, par un concours de circonstances, l’espoir taiseux d’un peuple opprimé. Scott puise dans la vraie histoire, dans la légende, dans des références (qui vont du Retour de Martin Guerre au Soldat Ryan), et mêle tout ça avec virtuosité. Les scènes de bataille sont somptueuses, Russel Crowe est sobre et puissant, Max Von Sydow est impérial, et Cate Blanchett donne une preuve supplémentaire de son talent protéiforme. Qu’elle incarne Bob Dylan, Audrey Hepburn, ou la Reine Elisabeth, c’est une grande !
En salle Club, quelques dernières séances de Shutter Island, de Scorsese, et la poursuite de notre Cycle d’Or. Dans les anciens palmés de cette semaine, le conflit Underground d’Emir Kurturica (Palme en 1995), le naïf Marty de Delbert Mann (en 1955), M.A.S.H. l’hôpital de guerre délirant de Robert Altman (1970), le sublime Guépard, de Visconti (1963), le Taxi Driver troublé de Scorsese (1976), la touchante Leçon de Piano de Jane Campion (1993) et la douce vie romaine de la Dolce Vita Fellinienne (1960).
Si Robin des Bois tient le haut de l’affiche, l’Enfance de l’Art rend hommage à un autre héros de la littérature et du cinéma. Tarzan l’Homme Singe, de W. S. Van Dyke, malgré sa condescendance raciste, classique des années 30, demeure un immense film, spectaculaire et sensuel. Et lançons ensemble un immense Oungawa pour Johnny Weissmuller.
Bonne semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action