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L'Édito

Atome crochu.

L'Édito

Atome crochu.

Chères spectatrices, chers spectateurs,

Le hit de la semaine, c’est Oppenheimer, dernier film toujours très attendu de Christopher Nolan, auteur d’un portrait fractalisé de l’homme qui dota l’humanité des moyens de se détruire en un instant. Cillian Murphy incarne le père de la bombe atomique dans un biopic aussi peu conventionnel que l’arme qu’invente le scientifique. Outre cette sortie, vous retrouverez nos succès récents, dont Master Gardener, accompagné d’un cycle Paul Schrader, ainsi que Trous de mémoire, un Vecchiali invisible depuis 1984, le pastel Asteroid City de Wes Anderson, et quelques autres. 

Né en 1904, Robert Oppenheimer fait partie du gotha des physiciens, même si son apport le plus connu à la science demeure une arme terrifiante, expérimentée sur Hiroshima et Nagasaki. Issu d’une famille aisée et éclairée, l’étudiant brille dans toutes les matières, scientifiques bien sûr, mais aussi littéraires, parlant couramment plusieurs langues, dont le sanskrit ! Il tira de la lecture de la Bhagavad-Gita, texte fondamental de l’Hindouisme, une terrible citation qu’il s’appliqua à lui-même après le premier essai réussi de son invention : « Je deviens la mort, le destructeur du monde ». Pourtant, Oppenheimer, qui travailla ou échangea avec les plus grands esprits de son époque – y compris Einstein -, ne cacha jamais ses sympathies de gauche. Chargé de concevoir – dans le plus grand secret à Los Alamos, ville invisible du Nouveau Mexique qu’il arpentait à cheval avec sa chère Kitty – le bras définitivement séculier des USA engagés contre le Japon, il tente d’alerter les autorités sur le trop grand nombre de victimes que pourrait provoquer son utilisation. En vain. Sa proximité avec certains humanistes de son époque le rend aussi suspect auprès des radicaux américains et notamment quand la chasse aux sorcières du maccarthysme poursuit avec une stupide obstination celles et ceux qui auraient pu avoir des liens avec le communisme. Oppenheimer paya les siens, pourtant ténus, au prix fort. Avant, happy end, d’être réhabilité. 

Christopher Nolan aborde dans son Oppenheimer tous ces aspects de la vie du physicien. Mais on connaît l’appétence du réalisateur pour mêler les temps et les lieux, et ne pas s’arrêter à une chronologique biographie. Il promène les spectateurs d’une époque à une autre, de l’Europe à l’Amérique, de la gloire à la déchéance, et de l’intime des êtres à celle des atomes qui se frappent et se cognent pour déclencher l’apocalypse. Comme Prométhée, dont la mythologie est évoquée, Oppenheimer vole le feu. Quelle sera sa punition ? Cillian Murphy, le magnétique Thomas Shelby des Peaky Blinders, et fidèle second rôle chez Nolan, trouve ici l’un de ceux qui marquent une carrière. Sa beauté fiévreuse et son regard perçant montrent le maelström qui agitait l’esprit insatiable du physicien. Aux côtés de ce grand acteur irlandais, une palanquée de stars : Robert Downey Jr., Emily Blunt, Florence Pugh, Casey Affleck, Rami Malek, Kenneth Branagh, Gary Oldman, et bien d’autres, dont Matt Damon en général d’armée investi d’une mission. Oppenheimer est un film exigeant (c’est souvent le cas chez Nolan), complexe, riche de nombreux personnages et de sauts temporels dans lesquels on peut se perdre (moins que dans son précédent Tenet, on vous rassure). D’un point de vue de la mise en scène, on est dans le très haut du panier, avec une incroyable virtuosité pour faire avancer les intrigues en parallèle… et parfois les croiser ! Sans compter le magnifique travail sur le son et la beauté plastique des plongées au cœur de la matière en fusion, qui mettent le spectateur… en ébullition !

Oppenheimer a été tourné en pellicule 35 mm et le Grand Action le projettera le plus souvent possible dans ce format. D’ailleurs, les 700 premiers spectateurs de cette vision non-numérique recevront un morceau de pellicule Kodak 35 mm « collector ». Une aubaine pour les pelliculophiles, qui pourront aussi offrir l’objet à un ami signopaginophile, collectionneur de marques-pages. Une excellente façon d’utiliser ce petit bout de celluloïd. 

Bref, avec ou sans cadeau, plongez dans Oppenheimer, un des musts de l’été 2023. 

Allez aussi voir les films affichés en fin de lettre, et amenez les petits découvrir L’Enfance de l’Art, présentée par la fée Diane. Mercredi à 10h30, elle sera à son aise pour guider les plus jeunes dans les Jardins enchantés, accompagner, jeudi à 10h30, la licorne U, de Grégoire Solotareff et Serge Elissalde, et promener Les 101 Dalmatiens, dans la merveilleuse version Disney de 1961, signée Clyde Geronimi et projetée dimanche à 14h.  

Belle semaine. 

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action