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L'Édito

Gatsby, the Great.

L'Édito

Gatsby, the Great.

Chères spectatrices, chers spectateurs,
En cette semaine où tous les feux de l’actualité cinématographique sont tournés vers la Croisette, notre programme ressemble à s’y méprendre à celui de la semaine dernière. Avec en vedette The Great Gatsby, version 1974 de Jack Clayton, mais aussi Promised Land, plaidoyer écolo fort bien troussé de Gus Van Sant, notre terrifiant Cycle John Carpenter et quelques séance de rattrapages.   

Gatsby le magnifique« Quand j’étais plus jeune, ce qui veut dire plus vulnérable, mon père me donna un conseil que je ne cesse de retourner dans mon esprit : quand tu auras l’envie de critiquer quelqu’un, rappelle toi que tout le monde n’a pas joui des mêmes avantages que toi. » Ainsi commence magnifiquement le narrateur de The Great Gatsby, dans le film de Jack Clayton adapté de Francis Scott Fitzgerald et qui n’avait pas été projeté en salle depuis sa sortie. Alors que Baz Luhrmann nous propose un nouveau Gatsby, baroque, flamboyant et un peu enflé, venez donc le comparer avec l’original, réalisé par un Britannique en 1974, avec un couple qui devait marquer l’histoire du glamour au cinéma : Robert Redford et Mia Farrow. Autour d’eux, de très bons seconds rôles, à commencer par le narrateur Sam Waterston, épaulé par Bruce Dern (Tom) et Lois Chiles (Jordan) et Scott Wilson (Wilson, justement). Il est très difficile d’adapter un livre aussi riche, et pourtant ténu, que Gatsby. Ça tient à peu de choses ; une ambiance, du rêve, des regrets, du mystère, des chemins que l’on prend – parfois sans en avoir le choix – quelques mensonges aussi. Et comme il faut toujours être deux pour provoquer un accident, cela tient également à des rencontres, douces ou fatales. « C’est ainsi que nous avançons, barques luttant contre un courant qui nous rejette sans cesse vers le passé ». Ce sont les derniers mots du livre et ils résument assez bien sa problématique. On pourra dire ce que l’on veut de l’adaptation de Clayton ; la trouver un peu datée (elle à près de 40 ans) ou maniérée ; considérer le montage un peu sec ou au contraire pointer l’artifice de certains raccords. Mais on n’enlèvera rien à la beauté de cette version, ni à son envie de coller à l’histoire et aux personnages. Et l’on sera encore conquis par la qualité de l’interprétation et la justesse de la direction d’acteur. Redford-Gatsby est impérial, auréolé de mystère et de charme ; Farrow-Daisy est aussi séduisante et blessée qu’agaçante ; Nick est parfait dans sa touchante réserve, Tom incarne une brute vitale, et Wilson est bouleversant de désespoir. Il se dégage de ce Gatsby une atmosphère festive et noire. Un peu comme prendre le volant d’un bolide après un cocktail, et rouler en riant vers son malheur. 

Toujours au programme de cette semaine, notre Cycle John Carpenter, avec 7 de ses films, et autant de raisons d’avoir peur au cinéma. Cinéaste de genre, Carpenter a su créer le sien. Un subtil mélange d’images, de raccords et de sons qui, sans grands effets, font monter la tension. On la trouve dans le brouillard de Fog, à bord de Christine, la voiture hantée, avec l’extraterrestre Starman ou le Prince des Ténèbres, en visitant le Village des Damnés ou l’Antre de la Folie, et en se laissant prendre par Los Angeles 2013 ou les Ghosts of Mars.

Si vous avez vu Gatsby et que les effrois de Carpenter vous laissent froids, il vous restera quelques séances de rattrapage. A commencer par Promised Land, où Gus Van Sant, sur un scénario de Matt Damon et John Krasinski, nous emmène dans l’Amérique profonde, ravagée par la crise et menacée par l’exploitation du gaz de schiste. Les  scénaristes, également interprètes, s’affrontent pour ou contre le forage. Mais, dans ce film qui paraît si simple, les choses sont bien plus compliquées… Et puis, restent encore la Passion selon De Palma – donc meurtrière, et Khroustaliov, ma voiture !, en hommage à Alexeï Guerman. Également  deux films déchainés : Django Unchained, de Tarantino, et Spring Breakers d’Harmony Korine, et le formidable (on vous l’aura dit) César doit Mourir des Frères Taviani.

Quant à l’Enfance de l’Art, elle nous entraine à la rencontre de L’Étrange créature du Lac Noir, de Jack Arnold. Ce célèbre film fantastique de 1954 fut tourné en 3D. Et c’est cette version en relief que nous sommes heureux de vous montrer ce dimanche à 14h.

Bonne semaine.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action