Les Proies pour l’ombre.
Chères spectatrices, chers spectateurs,
Voici donc la rentrée et la fin de l’été où l’on part chercher le soleil pour trouver un coin à l’ombre. L’ombre, c’est donc fini et voilà venir Les Proies, le dernier film de Sofia Coppola en sortie nationale, qu’accompagne un Cycle consacré à cette talentueuse jeune cinéaste. Outre ce beau cadeau de rentrée, vous retrouverez aussi notre programme estival avec Wilson, le râleur de bédé inventé par Daniel Clowes et mis en images par Craig Johnson, le burlesque Keaton, l’acrobate du rire, ainsi que le Fight Club de Pitt et Norton arbitré par Fincher, Equus, la folie équestre de Lumet, Le Privé, polar décalé d’Altman, L’extraordinaire Big Lebowski des Coen, la The Lost City of Z de James Gray et Certain Women de Kelly Reichardt. Que de films ! Heureusement, pour tous les voir sans vous ruiner, vous pouvez désormais vous offrir la nouvelle carte CIP. La presse a largement parlé de cette offre des 25 salles parisiennes indépendantes dont, bien sûr, le Grand Action. Non nominative, la carte CIP permet de bénéficier de tarifs préférentiels (de 5 à 6 € par entrée), tout en marquant son attachement à l’indépendance de la programmation. Une bonne action, et une bonne affaire !
Pas sûr que ce soldat Yankee blessé pendant la Guerre de Sécession (Colin Farrel) fasse, lui, une bonne affaire en étant recueilli par les pensionnaires d’un internat du Sud Profond. A l’ombre de ces jeunes filles en fleurs (Nicole Kidman, Kirsten Dunst, Elle Fanning…), il pourrait bien être une proie… Les Proies, un roman de Thomas Cullinan publié en 1966, fut d’abord adapté au cinéma par Don Siegel qui, en 1971, donna le rôle principal à son acteur fétiche, Clint Eastwood. 46 ans plus tard, Sofia Coppola reprend le scénario, mais en inversant le point de vue. On ne regarde plus l’histoire à travers le regard de l’homme blessé, mais par le prisme des femmes et des filles qui l’observent, le scrutent et le désirent, et qui, dans la version de Siegel, étaient assez passives. ça change tout et ça permet à Sofia de creuser son sillon en poursuivant son observation de la jeunesse féminine. Ainsi, la vertueuse et chaste blancheur des pensionnaires cache souvent une âme plus noire. On retrouve dans Les Proies la tonalité de Virgin Suicides, le premier film de la réalisatrice (au programme de son Cycle, avec Lost in Translation et The Bling Ring), dont l’un des rôles clés était tenu par Kirsten Dunst. La boucle est bouclée et Les Proies, délicieusement ferrées.
Vieux type acariâtre, provocateur et misanthrope, Wilson (Woody Harrelson, impeccable d’insupportabilité) est divorcé depuis longtemps. Il vit logiquement en solitaire, surtout depuis la mort de son père et le déménagement de ses derniers amis. Cet événement le conduit à retrouver son ancienne femme, et surtout à découvrir qu’il est le père d’une ado pas facile… Adapté d’un roman graphique par Craig Johnson, un jeune réalisateur venu de la télé, cette comédie incorrecte et radicalement « indé » est un petit régal, qui offre un rôle magnifiquement cinglé à Laura Dern.
Rappelons aux fans qui voudraient le voir pour la cent-douzième fois que Fight Club, le film culte de David Fincher, conserve quelques séances, tout comme le non moins mythique Big Lebowski, que l’on reverrait bien « one more time« . D’autres films cités en début de lettre gardent également l’occasion de briller cette semaine, idéale pour étrenner sa carte CIP.
Cet avant dernier paragraphe auto-promotionnel nous conduit naturellement vers l’Enfance de l’Art. Mercredi, nos amis du cinéma enfantin nous proposent quatre courts-métrages d’animation de Anna Bengtsson réunis dans un Voyage en ballon. Dimanche, il nous invite en musique voir la Drôle de Frimousse d’Audrey Hepburn dansant avec Fred Astaire pour Stanley Donen. Un régal.
Bonne reprise à celles et ceux qui sont rentrés et bonne fin de vacances aux autres.
Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du GrandAction
PS : petite pensée pour Jerry Lewis qui, non content d’être un type drôle, était un homme bien.