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L'Édito

Echec et cinémat

L'Édito

Echec et cinémat

Chères spectatrices, chers spectateurs,
Les 64 cases du jeu d’échec fascinent l’humanité depuis bien longtemps. Elles sont au centre de notre sortie de la semaine, Computer Chess, un film plutôt étrange d’Andrew Bujalski. A moins d’être un cinéphile très pointu, il y a des chances que vous n’ayez jamais entendu parler de ce réalisateur, pourtant éminent représentant du courant « Mumblecore » sur lequel nous reviendrons. Nous retrouverons aussi nos films des semaines précédentes : The Canyons de Paul Schrader, The Grand Budapest Hotel, de Wes Anderson, Le Loup de Wall Street, de Scorsese, et L’Étrange Couleur des Larmes de ton Corps, film plastiquement très abouti d’Hélène Cattet et Bruno Forzani. Cette semaine sera aussi marquée par deux événements, jeudi et vendredi soir. Le premier est un classique Cinéma-Club, animé par notre ami Jean-François Rauger qui nous parlera de Freaks, le chef d’œuvre de Tod Browning. Le second est une nouveauté : le Pop Corn Project nous proposera une soirée avec True Romance, de Tony Scott.

Jeudi soir, rendez-vous avec les bouleversants monstres de Freaks, réunis par la caméra de Tod Browning qui réalisait, en 1932, l’un des films les plus marquants de l’histoire. Il mettait en scène d’authentiques phénomènes de foire tels qu’on les exhibait alors dans les cirques. Mais les nains, les siamoises, les hommes tronc et tous les personnages difformes de Freaks sont bien plus humains que les êtres plus gâtés par la nature qu’ils fréquentent. Un film vraiment extraordinaire, une ode à la différence, qu’il faut absolument avoir vu. Et entendre ensuite la parole de Jean-François Rauger, critique sur-cultivé et d’ailleurs directeur de la programmation de la Cinémathèque, est un plaisir rare, qui se prolongera lors du cocktail à suivre.

Le lendemain, nous accueillerons le Pop Corn Project, de joyeux cinéphiles qui organisent des projections cocktails, avec débat et bonne ambiance, dans des salles parisiennes. Le Pop Corn Project pose cette semaine ses bobines au Grand Action pour nous montrer True Romance, un film culte des 90’s, écrit par Tarantino et réalisé par Tony Scott. Christian Slater et Patricia Arquette interprètent des Bonny et Clide contemporains qui pensent que l’amour arrête les balles et font les 400 coups avec une valise de coke, les flics et la mafia aux fesses. Un film cinglant et une soirée qui s’annonce explosive. Réservation impérative.

La nouveauté de la semaine, c’est donc Computer Chess, le quatrième film d’Andrew Bujalski, fer de lance du Mumblecore, de l’anglais to mumble, marmonner, un courant indépendant du cinéma américain né au début du 21e siècle. Les films Mumblecore ont en commun un style brut et une réalisation, souvent en noir et blanc, avec de tout petit budget mais une énergie débordante. Ils laissent aussi une grande place aux obsessions des personnages et trouvent leur inspiration dans le cinéma d’auteur européen, mâtiné par le Cassavetes des débuts. En attendant la semaine prochaine pour vous proposer un Cycle Mumblecore (dont Frances Ha est l’œuvre phare pour le public), voici donc Computer Chess, qui raconte, au début des années 80, un tournoi homme-machine autour d’un échiquier. Le radical Bujalski filme ses nerds marginaux et obsessionnels avec des caméscopes noir et blanc d’époque, et nous plonge dans le monde des débuts de la micro informatique et dans celui de la guerre froide qui semblait alors éternelle. Derrière la façade « faux documentaire » de Computer Chess se cache un humour ravageur, et une métaphysique qui n’est pas sans évoquer Kubrick. Aucune chance que ce petit bijou étrange soit un jour diffusé en prime time à la télé. Alors venez donc le voir au Grand Action.
Rappelons aux amateurs de curiosités que L’Étrange Couleur des Larmes de ton Corps est encore visible. Avec ce thriller fantastique, le duo de réalisateurs Hélène Cattet et Bruno Forzani rendent un hommage particulièrement réussi au Giallo, ce courant littéraire et cinématographique italien qui mêle horreur, mystère et érotisme. Une ambiance vraiment particulière et une image très léchée, que l’affiche laisse d’ailleurs deviner.
Avant de conclure avec l’Enfance de l’Art qui, dimanche, nous propose un déjà classique de l’animation, redisons que The Canyons de Schrader, The Grand Budapest Hotel, d’Anderson et Le Loup de Wall Street, de Scorsese, sont toujours projetés. Quant à l’Enfance, elle a choisi Kirikou et la Sorcière, petite merveille de Michel Ocelot. 

Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.